EXERGUE
Depuis 2005
Société 17.12.2005

Les mots ne sont pas si importants

Le bon vieux temps des colonies

Les députés de droite ont fait voter une loi du 23 février 2005, dont un article demandait de reconnaître le rôle positif de la colonisation, en particulier en Algérie : « Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux sacrifices des combattants de l'armée française issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont droit. » (Article 4). Cet article a déclenché la protestation d'historiens d'abord, puis de la communauté d'outre-mer, en particulier aux Antilles, où la colonisation rime avec esclavage, puis des partis de gauche, qui avaient pourtant voté initialement le texte, mais ont proposé d'abroger l'article fin novembre 2005. Ce qu'ils n'ont pas obtenu. La seule UMP étant majoritaire et pouvant voter n'importe quoi, ce qui donne le champ libre à ses ultra-conservateurs.

En fait, la question n'est pas de savoir si la colonisation a apporté quelque chose aux colonies. Les équipements ou les institutions mis en place dans ces pays étaient simplement ceux de l'époque (ou plus exactement, les moyens d'alors permettaient d'imposer des rapports sociaux qu'on aurait pu croire d'une autre époque). Il est certain qu'une forme d'idéologie civilisatrice était porté par la tendance modernisatrice et humaniste qui avait ses adeptes (nombreux sur le plan du discours) et ses praticiens (d'autant plus remarqués qu'ils étaient rares). Mais le discours en question est un peu ridicule quand on le transpose en langage clair. Spécialement aux Antilles, où il revient à faire bénéficier les békés partisans de l'esclavage de l'oeuvre abolitionniste de Schoelcher [1] ! Plus généralement encore, cela revient simplement à demander aux pauvres d'être reconnaissants des bienfaits que les riches leur apportent. Après tout, il s'agissait de territoires français, n'est-ce pas ? Et en France, on ne fait pas de différences autres que sociales, comme dirait la gauche. Ceux qui n'avaient pas envisagé cette présentation feraient-ils des différences ?

Mais tout ce qui précède consiste à faire plaisir aux intellectuels en faisant semblant de croire que ces débats ont un sens [2]. En fait, tout cela se résume à un simple rappel électoral des rapatriés pour leur dire de ne pas oublier de voter pour la droite. La question est alors, d'une part, d'estimer si cette question mobilise toujours les rapatriés au point de leur faire oublier toute autre motivation [3], et d'autre part, si ceux qui se sentent visés comme indigènes de la république ne constituent pas encore une masse électorale suffisante pour être elle aussi prise en compte. Le mot d'ordre lobbyiste « sortez les sortants ! » devrait amener les députés ou les maires à y réfléchir maintenant que les Blacks-Beurs s'organisent.

« Passer les racailles au Kärcher »

Les émeutes qui ont eu lieu dans les banlieues en France au début du mois de novembre 2005 ont eu pour origine la mort de deux jeunes qui fuyaient un contrôle de police (au faciès). Contrairement à beaucoup d'interprétations, cette réaction n'était que la répétition de ce qui était arrivé de nombreuses fois auparavant. Mais alors que ce genre d'émeutes se limitait généralement au quartier concerné, un vaste mouvement de solidarité a embrasé de nombreuses villes de France, et même quelques villes d'Europe. Ce qui est bien un phénomène politique majeur !

Les commentateurs ont considéré qu'un facteur de cette contagion résidait dans les déclarations du ministre français de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, en tournée (pré-électorale) dans les banlieues, quelques mois auparavant. De nombreux participants aux émeutes ont eux même repris cette interprétation qui semble s'être imposée comme la version officielle du simple fait de sa répétition. Mais on peut douter de cette justification a posteriori. Les accusations hâtives du ministre concernant les jeunes victimes le lendemain de leur électrocution dans un transformateur constituaient une condition suffisante, de même que les dénégations ridicules sur l'origine policière d'une grenade lacrymogène ayant atterri dans une mosquée au cours d'une des manifestations.

Ce ne sont donc pas forcément les termes du ministre, Kärcher et racailles, qui ont déclenché les émeutes. Quand, après le décès d'un enfant à La Courneuve d'une balle perdue le 19 juin 2005, Sarkozy a dit qu'il fallait « nettoyer les banlieues au Kärcher », cela pouvait simplement être interprété comme une simple figure de style, traductible par « énergiquement » (voir aussi : Sarkozy dérape). Disons que c'est du rap. Ce sont au moins autant les commentateurs que le ministre qui assimilent les voyous à de la saleté en faisant semblant de tout prendre au mot.

Quand au cours d'une autre visite en banlieue, le même ministre (décidément très rap, man) reprit le terme racailles d'une personne hors champ en disant qu'on allait en débarrasser le quartier, il utilisait aussi un terme devenu à la mode ces derniers temps, en jouant sur le registre populaire. Ici cependant, Sarkozy faisait bien une erreur en l'employant. Racaille (ou caillera en verlan) est un terme qui est utilisé par les jeunes eux-mêmes, comme nègre est parfois utilisé par les Noirs entre eux (surtout aux USA avec Nigger). Mais quand c'est un Blanc qui le prononce, il a un autre sens (des sites web d'extrême droite ou néonazis utilisent ce terme racaille comme leitmotiv depuis longtemps, et l'auteur du site SOS France a été condamné pour cela le 25/11/2005). Et si c'est un ministre qui emploie ce terme, on peut effectivement considérer qu'il est au minimum maladroit, plus vraisemblablement inapproprié, et au pire inacceptable (d'autant que c'est surtout le ton employé qui justifiait les interprétations en terme d'appel du pied à l'extrême droite). Ici encore, la moindre des politesses aurait été de s'excuser, surtout quand on critique la jeunesse pour son manque de respect. Il est toujours préférable de donner l'exemple que des leçons.


La Canaille (Paroles d'Alexis Bouvier, et musique de J. Darcier, 1865).

Dans la vieille cité française
Existe une race de fer
Dont l'âme comme une fournaise
A de son feu bronzé la chair.
Tous ses fils naissent sur la paille,
Pour palais ils n'ont qu'un taudis.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

Ce n'est pas le pilier du bagne,
C'est l'honnête homme dont la main
Par la plume ou le marteau
Gagne en suant son morceau de pain.
C'est le père enfin qui travaille
Des jours et quelques fois des nuits.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

C'est l'artiste, c'est le bohème
Qui sans souffler rime rêveur,
Un sonnet à celle qu'il aime
Trompant l'estomac par le cœur.
C'est à crédit qu'il fait ripaille
Qu'il loge et qu'il a des habits.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

C'est l'homme à la face terreuse,
Au corps maigre, à l'œil de hibou,
Au bras de fer, à main nerveuse,
Qui sort d'on ne sait où,
Toujours avec esprit vous raille
Se riant de votre mépris.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

C'est l'enfant que la destinée
Force à rejeter ses haillons
Quand sonne sa vingtième année,
Pour entrer dans vos bataillons.
Chair à canon de la bataille,
Toujours il succombe sans cris.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

Ils fredonnaient la Marseillaise,
Nos pères les vieux vagabonds
Attaquant en 93 les bastilles
Dont les canons
Défendaient la muraille
Que d'étrangleurs ont dit depuis
C'est la canaille, et bien j'en suis.

Les uns travaillent par la plume,
Le front dégarni de cheveux
Les autres martèlent l'enclume
Et se saoûlent pour être heureux,
Car la misère en sa tenaille
Fait saigner leurs flancs amaigris.
C'est la canaille, et bien j'en suis.

Enfin c'est une armée immense
Vêtue en haillons, en sabots
Mais qu'aujourd'hui la France
Appelle sous ses drapeaux
On les verra dans la mitraille,
Ils feront dire aux ennemis :
C'est la canaille, et bien j'en suis.

La racaille et la canaille

En outre, on peut s'étonner de l'approbation de cette rhétorique populiste de la part de la droite, qu'on a connue plus policée [4]. Mais condamner quasi unanimement le langage populaire est au fond tout aussi étonnant de la part des opposants de gauche au ministre. Il y a longtemps que la gauche n'a plus besoin de soigner son expression pour s'extirper de sa condition plébéienne [5]. Le défaut qui lui est reproché actuellement est plutôt celui d'appartenir à une gauche caviar, élitiste et coupée du peuple. En fait, la gauche a même raté un joli coup en ne choisissant pas de s'identifier aux jeunes, selon le procédé qui consiste à assumer l'insulte (comme pour l'impressionnisme). Justement, un précédent proche existe pour caractériser les pauvres dans une chanson prolétaro-patriotique, dont le refrain est « C'est la canaille, eh bien j'en suis ! » (voir ci-contre). Les professeurs d'histoire étaient-ils en vacances ?

Action symbolique

Mais les partis de gauche ont préféré exhumer dans le couvre-feu une connotation symbolique trop forte à la guerre d'Algérie (les professeurs d'histoire s'étant réveillés). On se demande au fond si toute la démarche de gauche n'est pas seulement symbolique. Ce doit être l'influence des intellectuels. Ce n'est pas qu'ils ne veulent pas analyser les phénomènes de façon plus actuelle, mais ils préfèrent ressasser les mêmes vieux clichés qui permettent aux amis de se rappeler les bons souvenirs. C'est tout juste s'ils ne déposent pas un projet de loi pour se rappeler le bon vieux temps de l'anticolonialisme. Ou bien cela procède-t-il d'un processus associatif : banlieue -> Arabes -> guerre d'Algérie, tout aussi réducteur.

Nous noterons que l'association d'idées à droite (polygamie -> jeunes qui traînent) repose au contraire sur un élément de vérité : en effet, ce n'est pas la polygamie, mais la démographie des banlieues en général qui a amplifié, sinon produit les émeutes (comme le baby boom avait été, vingt ans après, un facteur de Mai 68). Une trop grande quantité de familles nombreuses sont concentrées dans un trop petit espace. Outre de plus grandes difficultés à trouver du travail mécaniquement dues au nombre, il est normal que des jeunes fassent des bêtises (avec les phénomènes d'entraînement et de surenchère qui en découlent), et qu'un certain pourcentage d'entre eux devienne des voyous. Cette bévue de la polygamie illustre bien le fait qu'il ne faut pas se polariser sur les connotations (xénophobes et féministes), en ignorant la sociologie la plus basique. Mais la droite est un peu coincée quand il s'agit de critiquer des familles nombreuses normales, du fait de son idéologie traditionaliste.

Paradoxalement, les grandes déclarations selon laquelle ce serait d'abord une crise sociale n'ont pourtant pas suffit à déclencher un élan de solidarité. Ne se sentirait-on pas si proche des pauvres quand ils sont colorés, autrement que par une condescendance toute coloniale ? A quoi bon alors s'offusquer de l'emploi des termes Kärcher et racailles, si ce n'est pour réclamer la démission du ministre ? Des émeutiers, et des voix minoritaires à gauche l'ont explicitement réclamée, mais le soufflé est retombé par manque de suivi de la part des dirigeants des partis [6]. Si une grande manifestation (action codifiée) avait été appelée sur ce mot d'ordre simple, la crise aurait pu être canalisée, une partie de cette jeunesse aurait été reprise en main dans un cadre plus épanouissant que les prisons de la république. La future campagne présidentielle aurait aussi pris un tour intéressant. Et les jeunes n'auraient plus été de simples racailles. Encore raté ! Il ne reste plus aux jeunes que l'action symbolique qui permet de passer à la télévision en faisant brûler les voitures. La politique médiatique n'est plus qu'une fabrique d'image au lieu d'être une fabrique de sens.

Politiquement incorrect

Tout cela serait-il donc une question de dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas. Cette notion de politiquement incorrect est devenu le nouveau poncif du moment. D'autant que le combat contre la pensée unique signifie qu'il en existe au moins une seconde. En fait, paradoxalement, critiquer une prétendue bien-pensance constitue aujourd'hui la nouvelle bien-pensance. Car on ne peut pas dire précisément que la pensée dominante soit de gauche. Il semble que la droite se soit appropriée ce procédé stalinien de stigmatisation. Soit elle a compris le truc, soit plus vraisemblablement certains intellectuels de gauche sont passés à droite et conservent certaines habitudes.

Il est courant d'entendre qu'après la deuxième guerre mondiale, la pensée de droite était discréditée par la collaboration et que le parti communiste et ses intellectuels étaient tout puissants. Mais comme c'était aussi la période de la guerre froide et du stalinisme, on peut plutôt dire qu'il n'a jamais fait bon ne pas faire partie de l'idéologie dominante de droite ou de gauche. De même, on a pu entendre dire que le discours du Front national constituait une tentative de briser les tabous qu'avait imposés la vulgate de gauche, anticoloniale ou antiraciste, ou sur l'antisémitisme. Et plus généralement un nombre important de commentateurs croit avoir trouvé un argument dans le refus d'une « repentance permanente de la France ». Le pompon a été atteint avec Alain Finkielkraut quand il déclare que « l'antiracisme sera pour le XXIe siècle ce que le communisme a été pour le XXe ».

Décidément, à en croire ce non-conformisme revendiqué, certains pourraient penser que règnent en France (voire dans le monde) une pensée sans tabous et la fin de la culpabilité judéo-chrétienne. Serait-ce un effet tardif et insoupçonné de la pensée 68, qui se serait diffusée chez ceux-là même qui prétendent la combattre ? Au-delà de l'ironie, il doit bien y avoir quelque chose de cela malgré tout, qui différencie donc bien la société contemporaine de celle des années 1950. Dans des cas pareils, on peut parler d'hommage que le vice dogmatique rend à la vertu libertaire.

Remarquons néanmoins que si, depuis les années 1980, le thème de l'holocauste (puis Shoah) est devenu omniprésent, et effectivement source de tabous, c'était précisément parce qu'il avait été négligé depuis 1945. Il s'agissait d'un retour du refoulé. Pour l'esclavage ou la colonisation, on ne s'est pas repenti beaucoup, ni très longtemps. Or, du fait que la période concernée étant beaucoup plus longue, de nombreux travaux d'historiens sont encore possibles. Car les malaises à l'égard de l'histoire reposent aussi sur des interrogations qui méritent une réponse, ou le sentiment qu'on possède une sorte de mémoire difficile à partager ou, à plus forte raison, niée. Et si on faisait un reportage sur la connaissance de ces questions par le public et par les jeunes en particulier, on pourrait avoir un résultat aux questions « Sétif, Code noir, Madagascar, Toussaint Louverture, connais pas ! » qui serait certainement moins rhétorique (et faux cul) que le célèbre « Hitler, connais pas ! ». Il s'agit ici moins de repentance que de simple nécessité de connaissance et d'« accorder à l'histoire de ces territoires ou de ces personnes la place éminente à laquelle ils ont droit ».

Liberté et vérité

La question du politiquement correct soulève effectivement une série de questions fondamentales que le traitement habituel laisse néanmoins pendantes. Sur le mode de la liberté de recherche ou du non-conformisme, on semble pouvoir tout contester. Or cela suppose quand même qu'on étudie la question. Le principe de l'argumentation est qu'on doit pouvoir refaire le raisonnement (c'est le principe du calcul selon Leibniz). Dans le cas du négationnisme, malgré ce que suppose la théorie du complot qui règne dans ces milieux, on peut précisément considérer que l'existence d'une vérité effectivement admise ne constitue pas une démonstration du contraire. On peut imaginer qu'il existe aussi des connaissances acquises [7].

Nous avons un exemple de cette doctrine libertaire/autoritaire avec une interview d'Europe 1, le 25.11.05, où Elkabbach recevait Finkielkraut à propos de ses déclarations (voir L'Affaire) sur les émeutes des banlieues. Elle montre bien aussi le rôle normalisateur des médias dont la fonction est de remettre dans le droit chemin ceux qui s'en écarteraient, même au nom d'une libre recherche que revendique explicitement Finkielkraut : « Je cherche la vérité, c'est comme ça que je conçois mon travail et parfois, pour trouver le vrai, j'essaye, je déchire, je crois devoir déchirer le rideau des discours convenus. Je le fais au risque de me tromper, au risque aussi de susciter pour le peu de vrai que je découvre des haines inexpiables. » Mais il finira simplement par s'excuser de s'être mal exprimé comme Elkabbach le lui demande.

Notons aussi que ce que Finkielkraut reproche aux jeunes émeutiers peut aussi se lire comme des actes non policés équivalents à ce qu'il manifeste lui-même dans son discours. Cette situation est d'autant plus étonnante qu'il se revendique habituellement comme partisan de l'autorité de la tradition : « L'école, c'est, ou plutôt c'était, l'apprentissage de l'inhibition préalable à toute parole digne d'être exprimée [8] ». Il semble vouloir le beurre, l'argent du beurre, et le monopole de la crémière.

Finkielkraut semble croire aussi qu'il est le seul à chercher la vérité. Il ne considère pas que tout le monde soit dans son cas. Et chacun à son niveau, lui le premier, produit ce qu'il est capable de produire, c'est à dire le plus souvent pas grand chose. Et l'ensemble de ce pas grand chose constitue la seule réalité. C'est pourquoi Leibniz-Pangloss a raison contre Voltaire : « Tout est au mieux dans le meilleur des mondes [9] ». Avec la limite qu'une époque est seulement ce que ses contemporains sont capables d'en faire. Quand on parle de la colonisation ou du nazisme, on en juge avec les critères d'aujourd'hui. Et effectivement, l'esclavage ou la Shoah sont des crimes contre l'humanité. Mais il ne faut pas oublier qu'à leur époque, ces situations étaient légales et que la notion de crime contre l'humanité du tribunal de Nuremberg a elle aussi été élaborée rétroactivement. Il faut donc être très prudent en ce qui concerne le présent. On ne doit pas confondre ce que l'on souhaite et ce qui est, y compris quant à l'application réelle des lois qui ont déjà cours. Le pays légal n'est pas le pays réel, et le pays rêvé n'est pas le pays légal.

Une conception universaliste plurielle permet de résoudre le problème. Dans leur diversité et dans leur confusion, les opinions particulières peuvent être considérées comme des hypothèses et non comme des certitudes. Mais ces hypothèses demeurent virtuelles tant que des éléments ou le dialogue ne permettent pas de trancher [10]. Et le fait est qu'il faut savoir éliminer une hypothèse (sinon il s'agit d'un dogme). Le méthodologiquement correct consiste alors simplement à ne pas se comporter de façon méprisable sur le mode traditionnel d'une supériorité culturelle à la base du colonialisme, du racisme, de l'antisémitisme, qui correspond bien à une version républicaine (majoritaire) de l'aristocratisme, généralisé aux anciens roturiers. La notion d'égalité de droits n'est pas si facile à comprendre, au delà des mots.


Jacques Bolo


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Voir aussi :

Notes

1. Dans le même ordre d'idées, Finkielkraut dira, dans son interview au journal Haaretz : « The elimination of slavery is a European and American thing » [L'élimination de l'esclavage est un phénomène européen et américain]. On avait plutôt l'impression que l'esclavage avait été maintenu par les Européens et par les Américains (et la fin de l'apartheid est suffisamment récente pour qu'on s'en souvienne). A ce compte là, on peut aussi reconnaître le rôle positif de Pétain dans la Résistance. Comme disait un humoriste : « De Gaulle doit tout à Hitler. Sans lui, il n'était rien ». [Retour]

2. Décidément, le lobby des professeurs d'histoire domine un peu trop la vie intellectuelle en France. [Retour]

3. Il est en effet possible que ce soit le cas, si on considère que le Front National, qui profite d'habitude de ces voix, peut au fond aussi se résumer à une sorte de nostalgie de l'époque coloniale, non seulement des colonies elles-mêmes, mais simplement de l'ambiance qui y régnait dans la jeunesse de ceux qui ont vécu cette période. [Retour]

4. Qu'on pense en effet à la radio de droite Radio courtoisie, qui nous rappelle le bon vieux temps où l'Occupant allemand était lui aussi si bien élevé (les forces d'occupation ayant reçu des ordres en ce sens). [Retour]

5. Il y a surtout du professeur de français derrière la condamnation traditionnelle du populisme de l'extrême droite, en cela qu'elle s'attache bien trop souvent aux mots et non aux choses. Et que des rappeurs s'offusquent de termes agressifs fait un peu rigoler. Ce sont de bons élèves, finalement. [Retour]

6. Est-ce dû au mépris pour la racaille, au contexte de tension interne au Parti socialiste, ou par calcul électoral pour ne pas consacrer Villepin comme seul candidat aux futures présidentielle, ou Sarkozy comme porte parole sécuritaire ? Ou un peu de tout cela. [Retour]

7. Il est vrai que les intellectuels (de gauche) se sont fait une réputation de prétendre bousculer les idées reçues, de contester l'idée de vérité, de considérer les témoignages ou les biographies comme la construction de légendes personnelles (ce qui leur avait permis de contester la vérité du Journal d'Anne Frank, sur ces mêmes questions). On peut ainsi considérer que cette pratique se diffuse à droite. [Retour]

8. Alain Finkielkraut, Paul Soriano, Internet : L'inquiétante extase, p. 38. [Retour]

9. Et ça ne pourrait pas être pire non plus, puisqu'il n'y a pas d'autre monde d'où l'on regarderait celui-ci. [Retour]

10. Dans une perspective poppérienne, les hypothèses restent en quelque sorte toujours virtuelles puisqu'on ne peut que les réfuter, et non les vérifier. C'est d'ailleurs sans doute ce qui suscite le scepticisme méthodologique contemporain. Mais cette épistémologie est insatisfaisante : 1) On peut considérer au contraire qu'on possède des certitudes provisoires. Le fait qu'on les croit vraies leur donne (historiquement) ce statut, même si elles sont constituées d'hypothèses (qui se traitent logiquement comme des postulats), et 2) Chaque réfutation apporte davantage d'informations en spécifiant toujours plus les hypothèses. [Retour]


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