vol. 5 : Pour en finir avec l'affaire Dieudonné
L'humoriste Dieudonné a eu sa relaxe confirmée en appel le 7/9/2005. Il était accusé d'injure raciale et
incitation à la haine raciale par la Licra et le MRAP à propos d'un sketch plus ou moins improvisé à la télévision en décembre 2003, où il jouait le rôle d'un juif (israélien) extrémiste disant ou ne disant pas « Isra-Heil ! » (le sujet étant sensible, on n'avait pas eu droit à des rediffusions pour le vérifier[1]). Le tribunal a jugé que la parodie était légitime et ne généralisait pas le comportement critiqué à l'ensemble des juifs. Il a gagné également son procès, le 29/9/2005, contre Marc Fogiel, le producteur-présentateur de l'émission même où le sketch avait fait scandale. Dieudonné avait déposé plainte pour injure à caractère racial contre un faux SMS prétendument attribué à un télespectateur et rédigé en fait par un membre de l'équipe de l'émission, où il était question de l'odeur des Noirs (Marc Fogiel a fait appel). Après ces deux succès, on suppose que Dieudonné va apparaître dans la rubrique « En hausse » des magazines[2] !
Cette déplorable affaire trouve là une issue raisonnable qui ramène à de justes proportions une
escalade de provocations et de contre-provocations qui mélangent stratégies médiatiques et
gauchistes de part et d'autre. Gauchiste parce que, côté Dieudonné, son soutien aux
Palestiniens en relève sur le fond, et parce que sur la forme, le gauchisme ne connaît que la surenchère :
Il n'y est jamais question de la moindre concession à l'opinion adverse, tout en cherchant à se
démarquer de ses alliés par son maximalisme. Et côté pro-israélien, sur le même principe
partisan, le refus de toute critique sous peine d'accusation d'antisémitisme ressemble
beaucoup à l'ancien refus de tolérer une quelconque critique à l'égard de l'URSS. Même les
gauchistes qui étaient les premiers à la critiquer, entendaient être les seuls à y être autorisés,
sous peine d'accusation de révisionnisme (voir aussi "Feu, le communisme").
Les médias ont participé aux événements en jetant de l'huile sur le feu pour attirer de
l'audience, comme ce fut le cas dès l'origine dans l'émission de Marc Fogiel avec son faux SMS.
L'antagonisation est le procédé systématique qui structure les interventions télévisuelles ou
radio. Quand deux personnes sont invitées, il est difficile de partager la parole sur les points
d'accord (comme dans un documentaire), alors qu'elle se partage naturellement sur les points
de désaccord. Ce reality show politique est lui aussi scénarisé. Tout le monde sait bien que,
dès que la télévision est présente, les politiciens de camps adverses jouent le jeu d'une
opposition radicale alors qu'ils se côtoient pacifiquement au quotidien. Ils peuvent d'ailleurs être
amis à titre personnel, d'autant qu'ils ont pu faire les mêmes écoles. Ils partagent cette
connivence avec les journalistes eux-mêmes, comme on nous le rappelle de temps en temps
(voir "Bourdieu sociologue de la communication").
On constate cette réalité dans le simple fait que les politiciens
ou journalistes qui se tutoient dans la vie ne se tutoient pas à l'écran. Rappelons que le fameux
procédé de Karl Zéro, qui tutoie les hommes politiques qu'il interviewe
« maintenant qu'on se connaît », est justement fondé sur une tentative bien
imparfaite de résoudre cette question, en généralisant le principe sur le mode initial d'une ironie
qui est maintenant assimilée par ses invités à leur avantage.
Le malaise de l'affaire Dieudonné consiste bien évidemment dans le racisme et l'antisémitisme potentiels
des déclarations qui ont eu lieu au cours de cet épisode. Quand on traite de ces questions, les
clichés habituels structurent les discours ou leur perception, indépendamment même des
intentions de ceux qui les prononcent ou qui les entendent. Dieudonné a effectivement donné
l'impression d'utiliser des sous-entendus ou des accusations antisémites. Sa seule excuse en
la matière est que son créneau professionnel d'humoriste conduit naturellement, c'est-à-dire
culturellement, à s'appuyer sur un corpus de stéréotypes plus ou moins antisémites, en particulier
anti-mercantiles du fait du background gauchiste[3]. Une
nouveauté intéressante dans son cas est qu'il a introduit en France les élucubrations des Noirs
américains, concernant le rôle des juifs dans la traite des Noirs[4], voire
dans la diffusion du sida
en Afrique. Cela montre au passage que Dieudonné est un véritable homme politique qui ne
recule devant rien pour se constituer des alliés, en jouant sur les sous-entendus (comme les
fameuses odeurs dans le cas de Jacques Chirac – ce qui n'a pas empêché 80% des Français de voter
pour lui contre Le Pen). Dieudonné est même venu à la défense de la liberté d'expression des propos
crypto-négationnistes de Bruno Gollnisch[5], un des dirigeants
du Front National, qu'il avait pourtant combattu par le passé, notamment en se présentant aux
élections à Dreux en 1997. Et l'on ne peut s'empêcher de penser que voir les Noirs et les juifs
s'étriper doit bien faire rigoler les membres du Front national.
Dans l'autre camp aussi, les sous-entendus ou les vieux clichés racistes ont volé bas.
Évidemment, la première réaction dans les médias a surtout été au minimum d'essayer d'éviter
le terrain le plus miné qui soit. Mais rapidement, Dieudonné a essuyé un tir croisé de la part de
la quasi totalité des journalistes et des politiques, au point qu'une telle unanimité pourrait laisser
penser qu'ils profitaient de l'occasion pour se faire une virginité pro-israélienne à moindre frais.
Notons qu'il s'agissait bien d'une anticipation un peu précipitée de la condamnation, qui n'a
donc finalement pas eu lieu. Les écoles de journalisme vont avoir du travail, voire les avocats,
car si les accusations d'antisémitisme, la plupart du temps sans les hypocrites conditionnels
journalistiques habituels, sont déjà calomnieuses à son égard, les insultes racistes sont un délit
autrement plus grave[6]. Ceux qui se réjouissaient de voir Dieudonné perdre son
boulot (trop bien payé selon eux) pourraient aussi se retrouver au chômage.
Or, pas plus que je ne pense que Dieudonné est antisémite, je ne pense que les journalistes
en question sont racistes. Mais 1) quand Jacques Julliard traite Dieudonné de crétin sur LCI, il ne
manifeste pas à son égard la même diplomatie qu'envers les autres acteurs politiques dont il
commente l'action (le délit d'injure existe aussi, et la question est celle de la différence de
traitement pour un Noir). 2) De même, Guy Konopnicki, pour lequel il n'y a en principe pas de
doute, a pu produire une diatribe ampoulée pour ne pas daigner prononcer le nom Dieudonné : « On
parle beaucoup d'un ci-devant, manifestement ignorant des décrets de la Convention
supprimant le droit divin, ainsi que sa marque dans les patronymes. La Révolution préférait
l'Idée à Dieu et, en ce temps-là, il eût été rebaptisé Idée-donnée ou plutôt Idées-données »
(Marianne, "Pornographie mémorielle", 26/2/2005), et se livre à une leçon d'histoire condescendante
dont j'ai déjà eu l'occasion de dire un mot (voir "Indigènes
de la république"). 3) D'autres, nombreux, font référence à Dieudonné
en rappelant son patronyme : M'bala M'bala. On ne peut s'empêcher d'y voir un procédé
d'extrême droite comme dans le cas de la référence à Patrick Bruel alias Benguigui. Procédé
qui consiste, comme le dit Aragon à propos de l'Affiche rouge : « parce que à prononcer ces
noms sont difficiles, en tirait un effet de peur sur les passants ». 4) Dans un autre registre,
l'universitaire Eric Marty, dans un article du Monde du 7/3/2004, titré "Que Dieudonné se
rassure", commet la boulette du nouveau millénaire naissant en pontifiant : «Israël est la
première civilisation du monde à avoir donné aux Noirs une égalité anthropologique absolue
en faisant de ces fils de Cham les descendants directs d'un sujet universel – Adam». Or, outre
l'outrecuidance dérisoire de cette interprétation inepte, il est pourtant connu (surtout dans
le monde anglo-saxon), que cet épisode de la Bible est utilisé traditionnellement comme
une justification de l'esclavage. La légende en question attribue traditionnellement
aux trois fils de Noé, l'origine des Européens (Japhet), des Asiatiques (Sem)
et des Africains (Cham). Cham, maudit par son
père qu'il aurait vu nu et ivre, fut condamné à être le serviteur ou l'esclave de ses frères. Ici
aussi on pourrait donc légitimement s'inquiéter devant autant d'incompétence dans le monde
universitaire et Le Monde journalistique [7]. 5) Et à propos de l'affaire du
SMS de Fogiel Patrick de Carolis, nouveau directeur de France Télévision, qui parle de
« maladresse », qui lui valut une condamnation ainsi qu'à sa chaîne
pour « injure publique à l'égard d'un individu en raison de
sa race » ne semble pourtant pas considérer que Dieudonné en a commis une lui aussi. Au
minimum, dans tous les cas ci-dessus, des excuses (à Dieudonné) s'imposent.
Seuls les humoristes ont été un peu solidaires avec leur collègue et ami, au moins en lui
accordant le bénéfice du doute, ce qui les honore. D'autant qu'ils ont également manifesté des
réserves ou des critiques par la suite, au fil des déclarations de Dieudonné, démontrant un sens
de l'analyse et de la nuance. Cette affaire est aussi symptomatique du rôle de l'humour comme
moyen d'expression politique. Dieudonné, après Coluche, correspond au fond à la tentative de
franchissement des limites, de la soupape de sécurité (blagues dans les dictatures, humour juif,
sketches de politiciens américains), vers l'action et le discours politique direct (Band aid, Sidaction, Restos
du coeur). Comme Coluche qui avait abandonné sa course à la présidentielle pour se consacrer
aux Restaurants du coeur, espérons que Dieudonné trouvera une issue dans une action aussi
concrète quoique, on l'espère, moins palliative.
Scoop
Sur le fond, qui devrait aussi être une question à traiter aussi dans les médias, on peut résumer
la polémique à la nécessité d'une prise en compte des discriminations réelles plutôt que les
symboles, tel ce mythe fondateur [8] de la modernité qu'est la Shoah. L'erreur de Dieudonné a
consisté, comme on le lui a reproché, à sembler se livrer à la concurrence des souffrances,
sans doute sous l'influence de la tradition française de légitimation par l'histoire. Mais
curieusement, outre le fait qu'il en a parfaitement le droit, il se trouve qu'il existe
anecdotiquement une validité à sa récrimination. En effet, une origine concrète de
l'omniprésence actuelle de la mémoire du génocide des juifs par les nazis réside dans
le feuilleton de Marvin Chomski, Holocauste (1978). Or il se trouve que cette oeuvre qui
a beaucoup marqué le public à l'époque était en quelque sorte le deuxième volet du
précédent feuilleton Racines (Roots, 1977, de Marvin Chomski, John Erman, David
Greene, Gilbert Moses), qui traitait précisément de l'esclavage des Noirs ! Ce feuilleton
avait tout autant marqué le public, quoique brièvement donc, et l'on peut cependant lui attribuer
une grande influence dans la recherche des racines qui règne depuis cette époque (Noirs,
juifs et autres compris). Le moins qu'on puisse dire est donc bien que les Noirs se sont fait voler la
vedette. Ce qui n'est généralement pas apprécié des artistes, qui sont des gens très sensibles !
Guerre et paix entre les intellectuels
Mais les artistes expriment, par ces moyens symboliques et archétypaux, des situations et des
problèmes bien réels qui ne sont pas l'antisémitisme, mais bien les discriminations qui
concernent, en France, les Arabes et les Noirs. Ce qu'on appelle le nouvel antisémitisme
correspond seulement à l'antisionisme et vise effectivement les juifs de façon indifférenciée
tout simplement parce qu'ils soutiennent très majoritairement Israël, comme les Arabes et les gauchistes
soutiennent les palestiniens de façon tout aussi partisane. La méthode terrorisme est ici une
application de la guerre moderne qui vise les populations civiles, et les guerres idéologiques
sont des guerres totales (mais c'est moins nouveau). Les amateurs de mots que sont les
intellectuels (et la tradition juive) ne devraient accepter d'utiliser le terme antisémitisme pour
désigner ces autres Sémites que sont les Arabes. On peut évidemment essayer d'inventer des
nouveaux termes, comme judéophobie et antifeuj, mais le mot juste existe déjà, et c'est
antisionisme. Si précisément on ne joue pas sur les mots, les symboles, les connotations, les
identifications, on peut considérer que le problème des juifs et des Arabes en France n'est pas
d'importer en France le conflit israélo-palestinien, mais plutôt d'exporter au Moyen-orient la
cohabitation qui existe (ou qui existait) en France. Sinon on risque d'en arriver même à la
situation absurde où la guerre continuerait ici alors qu'elle serait finie sur le terrain. Bref, de
même que le but final est la paix en Israël entre les juifs et les Palestiniens, il va bien falloir
qu'en France on arrive à la coexistence pacifique de Finkielkraut et de Dieudonné [9].
Les médias, au cours de cette affaire, ont encore accentué le véritable problème que pose, pour
les intellectuels, la manipulation de symboles. Cette opération doit s'accompagner d'une grande
prudence, comme le soulignait Camus à l'époque de la Guerre d'Algérie :
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« La vérité, hélas ! c'est qu'une partie de notre opinion pense obscurément que les
Arabes ont acquis le droit, d'une certaine manière, d'égorger et de mutiler, tandis qu'une
autre partie accepte de légitimer, d'une certaine manière, tous les excès. Chacun, pour
se justifier, s'appuie alors sur le crime de l'autre. Il y a là une casuistique du sang qu'un
intellectuel, me semble-t-il, n'a que faire, à moins de prendre les armes lui-même.
Lorsque la violence répond à la violence dans un délire qui s'exaspère et rend
impossible le simple langage de raison, le rôle des intellectuels ne peut être, comme on
le lit tous les jours, d'excuser de loin l'une des violences et de condamner l'autre, ce qui
a pour double effet d'indigner jusqu'à la fureur le violent condamné et d'encourager à
plus de violence le violent innocenté. S'ils ne rejoignent pas les combattants
eux-mêmes, leur rôle (plus obscur, à coup sûr !) doit être seulement de travailler dans
le sens de l'apaisement pour que la raison retrouve ses chances. »
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Cette citation de Camus (exacte sur le fond, mais déséquilibrée sur la forme : « égorger » d'un côté, « excès » de l'autre, sans doute du fait de son drame personnel) caractérise un aspect de la problématique pro-palestinienne, présente chez Dieudonné, mais davantage constitutive de l'intervention d'Edgar Morin, Danièle Sallenave et Sami Naïr, dans le Monde en 2002, pour
laquelle ils ont été condamnés le 26 mai 2005 par la Cour d'Appel de Versailles[10].
Médiation symbolique
La méthode employée par Dieudonné, qui se fourvoie lui aussi dans la référence historique à l'esclavage
et à la colonisation en général ou dans la géopolitique du Moyen-orient, correspond plutôt à
un biais intellectualiste bien français qui consiste à s'envoyer de grands mythes à la figure.
Or son objet n'est pas au fond d'ordre idéologique. Il existe des préjugés antisémites et
racistes, assez répandus en ce qui concerne les clichés culturels, et limités aux néo-nazis sous
leur forme extrême. Mais qui peut contester que les discriminations frappent davantage les
Noirs et les Arabes que les juifs en France. Ce qui n'a pas de raisons d'être traduit
symboliquement par une comparaison historique de l'esclavage et de la Shoah[11].
Alors qu'il ne fait aucun doute que le pays légal condamne les discriminations raciales, chacun sait que le pays réel en connaît tous les jours. De plus, des cas constants de mauvais traitements envers les Noirs et les Arabes par la police n'ont évidemment pas d'équivalent pour les juifs (de nos jours !). [Ajout :] Quand Alain Finkielkraut déclare : « Il n'y a pas de concurrence des victimes. Les juifs actuels ne sont pas plus les victimes de la Shoah, que les Arabes, les victimes de la colonisation, ou les Noirs, les victimes de la traite. Nous sommes tous autres, par rapport aux victimes. C'est bien pour cela qu'il y a un devoir de mémoire. » (L'Arche, septembre 2005). Outre qu'il s'agit là d'une rationalisation un peu tardive, Finkielkraut se situe précisément sur le même plan que Dieudonné (ou plutôt Dieudonné se situe sur le même plan que lui). Car au contraire de l'antisémitisme, les discriminations visant les Noirs et les Arabes sont bel et bien actuelles en France (et ailleurs)[12]. C'est pour cela qu'ils ont tort tous les deux de se placer sur ce terrain de la mémoire. On voit bien que les moyens symboliques ne sont ni efficaces sur le plan concret, ni à l'évidence sur le plan intellectuel pour penser le problème ! Et c'est là la véritable leçon à tirer de cette affaire.
Par contre, avec l'usage de cette mythologie, Dieudonné applique une stratégie explicite de
constitution d'un lobby noir. Son importance s'est manifestée dans les élections européennes
de juin 2004, où Dieudonné lui-même se présentait sur une liste Euro-Palestine qui a obtenu
50.037 voix (1,83%) en région parisienne. Dans le même esprit, le score de Taubira, candidate
originaire de Guyane, au premier tour de l'élection présidentielle (660.576 voix, 2,32%) fut
particulièrement significatif dans les seuls DOM-TOM (78.914 voix, 13,06%). Ces voix du centre
gauche et de la communauté noire ont certainement coûté la participation de Jospin au second
tour, qui s'est retrouvé en troisième position (4.610.749 voix) derrière Le Pen (4.805.307)
et Chirac (5.666.440).
Si cette stratégie de lobbying réussit, Dieudonné pourra être crédité d'avoir créé l'événement,
au risque pour lui d'y avoir sacrifié sa réputation. Déjà, la traite des Noirs et la colonisation
semblent être devenues, en 2005, des thèmes abordés dans tous les médias, alors qu'ils
avaient quasiment disparu depuis longtemps. Mais est-ce bien le problème ? Ce traitement
médiatique ou historique de la véritable question restera toujours sur le modèle de la médiation
symbolique. Faut-il vraiment traiter des représentations des communautés par leur histoire ?
Il est possible que ce soit nécessaire, au moins jusqu'à un certain point. Mais cela risque aussi
d'être contre-productif, soit pour les participants (comme Dieudonné), soit vis-à-vis de la
perception du phénomène par le public ou les autres communautés. N'oublions pas justement
que toute la polémique est elle-même une réaction à une situation similaire.
Jacques Bolo
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Notes
1. Le débat a fait rage sur ce point alors qu'il existe pourtant un enregistrement vidéo !
Y aurons-nous droit à présent que la cour a jugé la satire légitime ? Ce sera
l'occasion de vérifier l'objectivité de la télévision française. Car cela ne laisse guère augurer de celle de
la vidéo-surveillance, si on ne la montre que quand elle incrimine les accusés (les effacements
accidentels étant fréquents) ! D'après une transcription disponible sur internet, il semble que le sketch de
Dieudonné, visiblement rédigé sommairement sur place, visait essentiellement l'autre humoriste Djamel
sur le mode de l'assimilation des Arabes au terrorisme par un extrémiste juif, avec le retournement final qu'on lui reproche. [Retour]
2. En fait, il est au contraire apparu dans la rubrique en baisse du Point parce qu'il avait été attaqué par quelqu'un d'autre. On va finir par se poser des questions. [Retour]
3. Rappelons que les juifs, dans la société traditionnelle européenne, étaient interdits de propriété foncière, dans une société composé à 80% d'agriculteurs, et se trouvaient confinés à des professions libérales, artisanales ou commerciales. Or la tradition marxiste n'est à l'évidence pas connue pour penser la question. [Retour]
4. La question de l'esclavage et de la traite n'est pas de savoir si des juifs y ont participé, ce qui paraît a priori évident, au même titre que les catholiques, les protestants, et bien sûr les musulmans (chez qui
Noir se dit esclave (abdi, oussif)). [Retour]
5. Il avait déclaré, le 11 octobre 2004, qu'il appartient aux historiens d'établir l'existence des chambres à gaz. [Retour]
6. Je plaisante, bien sûr. [Retour]
7. La bévue n'a pas été relevée, ni par la rédaction du Monde ou les autres journaux (il est vrai qu'en France
on manque cruellement de facts checkers à l'américaine), ni par les universitaires qui maintiennent donc
en poste, soit un idéologue esclavagiste, soit un incompétent : il est vrai qu'il n'est qu'un professeur de
littérature, comme Faurisson. Au point qu'on préférerait même qu'Eric Marty soit raciste, il aurait
habilement réussi son coup. Hélas (pour ses étudiants) je pense qu'il veut bien faire, mais n'en est pas
aussi capable qu'il le croit (comme Dieudonné). [Retour]
8. Comme on le sait, la notion de mythe fondateur ne désigne pas une erreur ou un mensonge, mais un
événement qui sert de fondement à une civilisation : Auschwitz et Hiroshima peuvent être perçus ainsi,
spécialement par le courant post-moderne. Au cours de l'affaire Garaudy, certains avaient parfois joué
sur cette ambiguïté. Garaudy le premier sans doute, en se faisant éditer par des négationnistes. [Retour]
9. Dit autrement, si Finkielkraut a pu passer sur le passé nazi avéré de Heidegger, il devrait pouvoir passer sur les maladresses (comme dirait Patrick de Carolis) de Dieudonné. A moins que le côté absolu de la philosophie ne permettent pas de garder le sens des proportions. [Retour]
10. Cette condamnation me paraît être une erreur sur le fond, comme je l'ai déjà dit dans un article
précédent (voir "Morin n'est pas antisémite"), et une faute sur la forme dans la mesure où l'arrêt rendu au nom de la généralisation constitutive du délit de diffamation raciale, contient précisément une citation qui le contredit : « ...une nation de fugitifs issue du peuple le plus longtemps persécuté [...] soit capable de se transformer en deux génération [...] et à l'exception d'une admirable minorité en peuple méprisant ayant satisfaction à humilier », tirée de l'article original paru dans Le Monde. [Retour]
11. Notons cependant que Max Gallo, pourtant historien prétendument de gauche, ne s'est pas privé de minimiser le rétablissement de l'esclavage par Napoléon, au cours de la promo d'un de ses livres en
décembre 2004 sur FR3. Il a dû faire des excuses, sans doute sous peine de se voir accusé d'apologie
de crime contre l'humanité, puisque l'esclavage a été déclaré tel par le parlement le 10 mai 2001. On n'a
pas entendu les hommes politiques s'offusquer publiquement de cette minimisation, de la part d'un de
leurs anciens collègues. Et les grands médias (Le Monde, Le Figaro, Libération) sont restés si discrets
que le silence est remonté au cours de l'or. [Retour]
12. Et la question existentielle de savoir après coup ce que l'on aurait fait sous le régime de Vichy, devant la répression des juifs et le discours d'hygiène raciale, si on serait entré en résistance et comment, devient celle de savoir ce que l'on fait aujourd'hui contre le racisme, la discrimination à l'embauche, au logement. Et qui sont ces collaborateurs qui imputent le manque d'intégration à ceux qui en sont victimes ? Je ne voudrais pas être méchant envers Finkielkraut, mais son rejet obsessionnel du métissage me semblent aussi être dû à l'influence de ses lectures un peu trop datées, où de ceux qui les imitent, comme Renaud Camus que Finkielkraut avait eu l'occasion de défendre (probablement parce qu'ils doutent tous deux de l'intégration culturelle des derniers arrivés – Renaud Camus comprenant aussi les juifs dans le lot). [Retour]
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