Pierre Jourde vient de publier un billet sur « Jean-Noël Darde, le Torquemada du plagiat ». Bizarrement, après avoir brièvement dénoncé la pratique, il s'attaque à Jean-Noël Darde qui s'est fait une spécialité récente de dénoncer le plagiat universitaire. Pour dégommer violemment la crédibilité scientifique de Darde, la méthode Jourde consiste à pratiquer fièrement le « Qui parle ? », en usage chez les staliniens de la grande époque. Leur influence sur l'intelligentzia française a laissé de mauvaises habitudes. Jean-Noël Darde rétorquera sur son propre site consacré au plagiat, dans le billet : « Les abattis du professeur Pierre Jourde », où il réfute les attaques de Jourde de façon détaillée.
J'avais déjà remarqué que Jourde était un peu faux-cul. Mais qu'est-ce qu'il souhaite ? Que les thèses soient de simples plagiats au lieu de contribuer à la recherche ? Souhaite-t-il la même chose pour la littérature ou seulement pour les universitaires ? Ne se rend-il pas compte qu'il risque de discréditer ses doctorants ?
Ce débat est ridicule, tout le monde n'est pas obligé d'être un découvreur (ou un écrivain génial pour la littérature), et on peut apporter beaucoup à la connaissance en expliquant mieux des choses difficiles, en fournissant de nouvelles illustrations ou confirmations à une étude antérieure, en étudiant des variantes, en faisant des enquêtes d'opinion, en étudiant la réception de la connaissance, etc. C'est différent que d'être un plagiaire. Il faudrait peut-être que ces options et leur méthodologie soient mieux précisées pour les étudiants, justement, pour qu'il y ait moins de plagiats.
Le problème du plagiat relève de la fraude, le plus souvent inutile puisqu'il s'agit de citer correctement, et de mettre en perspective comme je l'ai indiqué dans le commentaire du plagiat dont j'ai été victime (et qui m'avait été signalé, précisément, par Jean-Noël Darde lui-même). Cela éviterait d'ailleurs des confusions possibles dans les articulations du discours pour le plagiaire lui-même, s'il en identifiait mieux les différents auteurs. Cette méthode d'analyse des textes ou des phénomènes est justement l'essence de la capacité de production intellectuelle. Et c'est celle qu'on doit acquérir dans la formation universitaire.
Une des origines du plagiat est sans doute le conformisme qui tend à ne pas se risquer à contredire les auteurs canoniques. À force de citer trop servilement, on prend l'habitude du copier -coller et on finit par croire qu'on l'a pensé soi-même. De la part de Jourde, il est en d'autant plus inexplicable de s'attaquer à la dénonciation du plagiat dans la mesure où il a fait sa réputation de critique littéraire sur le non-conformisme académique. Faut-il croire que la pesanteur universitaire est contagieuse ? Faudrait-il décontaminer les bâtiments ?
On peut espérer que la nouvelle équipe du ministère, qui a bien voulu tenir compte (excepté le conditionnel) du signalement du plagiat me concernant, poursuivra dans cette approche :
Il en va de la crédibilité de la recherche française et spécialement des sciences humaines qui ont tendance à être d'autant plus contestées qu'elles sont contestables. Qu'au moins ce ne soit pas par malhonnêteté !
Le niveau intellectuel de la population est beaucoup plus élevé que par le passé. Les diplômés ne se satisfont plus d'une aura de mandarin intouchable qui pouvait se permettre n'importe quoi. Il ne faut pas discréditer les lanceurs d'alertes. J'ai déjà eu l'occasion de signaler que les récents scandales industriels (Spanghero, PIP) n'avaient pas été traités avec assez de rapidité et de sévérité. Ce ne sera pas sans conséquence sur la réputation de l'industrie française, et cela discrédite injustement ceux qui font correctement leur travail.
Aujourd'hui, il faut savoir traiter rapidement les situations de crises au lieu de tenter d'étouffer les scandales comme au bon vieux temps. Il en va de l'image de marque et de la crédibilité de l'université française dans la concurrence internationale qui est en train de faire rage.
Jacques Bolo
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