Jean-François Copé nous avait « Promis, j'arrête la langue de bois » (2006), selon le titre d'un de ses livres. Il vient pourtant de nous faire une jolie prestation, dimanche 15 janvier 2012, sur France Culture, dans l'émission Radio France Politique. Mais il faut le comprendre, il est obligé de coacher l'UMP qui commence à s'agiter en ménageant la chèvre et le chou (pas de noms !). Il doit soutenir la réélection d'un président en chute de popularité, qui ne s'est pas encore déclaré candidat. Le gouvernement est en panne de réponse à la situation économique catastrophique à trois mois des élections. En même temps, Copé pense aux présidentielles de 2017, et doit se demander s'il est préférable que son camp perdre en 2012 (et comment y contribuer sans le faire remarquer), où s'il faut emmener les troupes à la victoire pour s'en attribuer le mérite. Ne parlons même pas des affaires, car les boules puantes volent bas en ce moment.
Comme je le disais il y a un an, à propos d'une émission de Ruquier (où, soit dit en passant, j'anticipais le remplacement d'Éric & Éric par une miss - au lieu de deux, j'étais pas loin) : « va-t-il nous refaire le coup des 35 h en 2017, en s'y prenant sept ans à l'avance ? ». Cela m'avait un peu énervé contre lui, très injustement, car je ne suis pas un politique. On s'excite, on s'excite, et on dit des mots qui dépassent notre pensée. On parle de « tête à claques », d'« enfumage ». Mais c'est qu'on ne mesure pas toute la subtilité du personnage qui doit concilier les différentes tendances d'un parti et des électeurs qui veulent tout et le contraire de tout. Je préfère ne pas y penser. Je ne sais pas faire. En fait, je suis incapable d'imaginer quelque chose de ce genre. Simple que je suis !
Bref, au cours de l'émission, il m'a donné la leçon que je méritais et que j'accepte humblement. Je reconnais le maître. Pas le mien. Ce n'est pas mon créneau. On ne peut pas jouer sur tous les tableaux. Mais je sais apprécier le bel ouvrage.
Comme je mentionnais l'expérience allemande de réponse à la crise par le partage du travail et le chômage technique, et que cette idée commence à se répandre chez les journalistes, il a donc été mis devant l'obligation de se contredire ou de persister dans l'erreur. Certes, il reprend encore l'antienne selon laquelle « le travail ne se partage pas », que j'ai fait remonter à Alfred Sauvy et dont j'ai démontré la fausseté (Le retour des 35 heures). Copé doit encore faire des progrès sur le sujet. Mais il a bel et bien reconnu que c'était pourtant le cas. Son astuce a été de dire que la solution n'est pas le chômage partiel, mais le travail partiel. Bien trouvé !
Rien à dire. On va faire comme ça : je dirai mes trucs et Copé traduira « en politique » et tout le monde sera content. Bon. Maintenant, ce n'est pas les 35 h qu'il faudra proposer, mais plutôt les trente ou les vingt-cinq. Copé pourra toujours dire qu'il va plus loin que la gauche (je commence à m'y mettre).
Une proposition concrète qui n'est pas encore dans les tuyaux : comme le principal problème du marché du travail est celui de l'entrée et de la sortie de la vie active, une solution serait de proposer un passage au mi-temps des seniors (pour faire passer la pilule de la prolongation d'activité) qui libérerait des mi-temps pour les jeunes. Je n'en dis pas plus. Je laisse Copé s'occuper des détails.
On fait une bonne équipe.
Jacques Bolo
|