Le Monde du 24 décembre 2008 signale que : « Un faux Bertrand Delanoë mystifie le New
York Times » en dénigrant la compétence de Caroline Kennedy pour remplacer la sénatrice
Hillary Clinton. La fausse lettre « s'inquiète de la propension dynastique » indiquée cette
éventuelle candidature... Comme on s'y attendait en la circonstance, le NYT a publié
rapidement un rectificatif et des excuses déclarant que « ce faux (...) n'aurait jamais dû être
publié ».
Serait-ce une nouvelle stratégie qui révélerait justement le déclin démocratique des sociétés
occidentales ? Car cette prétendue « fausse » information est bel et bien une vérité pure et
simple. N'aurait-on plus le droit d'exprimer ce genre de remarque autrement que comme une
fausse opinion rapidement démentie ? Personne n'osant prendre le risque de se griller en
disant ce genre de banalités de base en Amérique en général, et dans le monde des médias en
particulier ?
Rappelons que cette technique de dénonciation des opinions hérétiques est la technique
habituelle du Vatican, ou des partis communistes soviétique et chinois de la grande époque.
Cela permet au public averti de constater l'existence de divergences et de luttes d'influence au
sein de la haute hiérarchie. Et le canular dénonçant une fausse information est aussi un
procédé situationniste obligeant ses victimes à la confirmer (ou au moins à la diffuser) en
publiant un démenti.
Il reste que le vrai Bertrand Delanoë n'a sans doute pas été capable de cette prise de position
pourtant démocratique – ou qu'il a joué au billard à trois bandes en publiant un « vrai-faux
bordereau ». D'ailleurs, si cela avait été le cas, on aurait pu insinuer qu'il visait Martine Aubry.
Et il aurait eu raison aussi ! Mais le plus étonnant est qu'il soit connu aux États-Unis (ce qui
inciterait à le soupçonner de vouloir s'y faire connaître).
L'avantage des dictatures est qu'elles ont toujours produit des trésors de subtilités pour
contourner le conformisme. La créativité naît du retour du refoulé.
Jacques Bolo
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