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Politique 28.2.2007

En campagne 2007

Rappel

Il y a un peu plus d'un an, en décembre 2005 (voir Vote utile, vote inutile), j'évoquais en ces termes la question des présidentielles, à propos d'un sondage de la revue Marianne : « La seule question qui se pose pour des présidentielles est de savoir qui sera présent au second tour. Et l'on se souvient que Jospin trouvait ridicule l'idée de ne pas y être. On peut imaginer, malgré toutes les mauvaises habitudes, que la leçon aura été retenue par une partie des dirigeants et surtout des électeurs. Concrètement, une plus grande partie de l'électorat de gauche devrait choisir de voter utile. »

Contrairement au sondage de Marianne, mon hypothèse était que si la droite et l'extrême droite étaient divisées entre Sarkozy, Le Pen, Bayrou, Villiers (+ Villepin qu'à l'époque Marianne donnait gagnant contre Sarkozy), plus les petits candidats habituels (le souverainiste Dupont-Aignan, un écologiste, les chasseurs, etc.), alors la gauche pouvait être seule au second tour si l'extrême gauche, le PC, les altermondialistes arrivaient à s'unir. Et je concluais sur : « Finalement, on pourrait avoir des élections présidentielles intéressantes. Mais il faudrait pour cela que les électeurs cessent de vouloir se faire plaisir. Rien n'est moins sûr. » Il semble que l'affaire soit réglée pour l'extrême gauche. Mais la situation a un peu changé.

Mise à jour, fin février 2007

A droite, Sarkozy a réussi à éliminer Villepin (qui n'a pas osé franchir le Rubicon, on se demande bien pourquoi) et presque tous ses concurrents à l'UMP. Bayrou a pris une importance inquiétante pour les autres au point de prétendre être présent au deuxième tour. On imagine d'ailleurs qu'il a récupéré ceux qui se seraient précisément portés sur Villepin. Villiers est toujours présent et Le Pen semble encore plus sous-évalué par les sondages que d'habitude, alors qu'il s'est rallié les anciens dissidents du MNR de Megret, voire Dieudonné. De plus, il semble que la volonté de dynamiter le système s'élargisse, réunissant paradoxalement les émeutiers de 2005 et ceux qui veulent le rétablissement de l'ordre ! La surprise pourrait être un score de Le Pen encore meilleur que la dernière fois.

Les voix de droite restent éparpillées : même en supposant (comme dans mon article précédent) un score de droite à 60% et de gauche à 40%, si on a Bayrou : 20%, Le Pen au moins 20% ; il ne reste que 20% maximum pour Sarkozy, qui pourrait donc être éliminé au premier tour.

L'autre surprise possible

Le PS semble objectivement renforcé après les primaires qui ont vu la victoire de Ségolène Royal. Les tentatives journalistiques de s'attacher aux détails pour le masquer ne changent rien aux réalités de base. D'autant que cette fois, des accords ont permis de rallier le MRC de Chevènement ou les radicaux de gauche et leur ancienne candidate Taubira. Comme l'extrême gauche n'a pas réussi à s'unir, le vote utile pourrait bien augmenter. Mais les primaires ont aussi laissé des traces, et certains envisageraient de s'abstenir ou de voter Bayrou par dépit ou par recentrage. Ces phénomènes ont toujours lieu du fait des rancoeurs de ceux qui s'engagent un peu trop affectivement dans les éliminatoires et qui se croient toujours dans les primaires.

Un facteur essentiel, curieusement minimisé, reste par contre le fait qu'une femme présidente peut plaire à l'électorat féminin et à une partie de l'électorat masculin qui espère certains changements – dont celui-là ne serait pas le moindre (voir Statut des femmes). Certaines féministes osent faire la fine bouche ! Mais le gros des troupes devrait voter comme un seul homme [il a osé !].

Bref, la question initiale aurait pu devenir : « Ségolène Royal pourrait-elle être élue au premier tour ? ». Cela aurait pu être le cas si l'extrême gauche (ou la plupart de ses électeurs dans le secret des isoloirs) s'était ralliée au vote utile en reconnaissant honnêtement son échec à s'unir. Ajouté au facteur précédent du vote de femmes qui veulent être enfin représentée au plus haut niveau, l'apport supplémentaire féminin aurait pu faire basculer le rapport droite-gauche qui est aujourd'hui en faveur de la droite. Rappelons, que les indécis pourraient être des indécises.

Le « facteur » gaucho

Cette possibilité n'est pas en voie de se réaliser. Car l'extrême gauche poursuit ses délires antilibéraux (voir Feu l'antilibéralisme) sans avoir les pétrodollars de Chavez. Chaque candidat et chaque groupuscule essaient de tirer la couverture à lui sans avoir aucune perspective réaliste d'en tirer le moindre avantage. Les candidats déclarés ne sont pas d'assez grosses pointures. Tout au plus se seront-ils positionnés pour la suite, ce qui est légitime en terme de carrière personnelle (quoique toujours politiquement inutile). Mais il ne faut pas trop le dire aux militants, ils n'aiment pas ça.

L'extrême gauche a raté la seule solution autonome existante qui était de s'allier à Jean-Pierre Chevènement. Il était le seul à pouvoir faire un score honorable, voire à créer la surprise (si certains éléphants socialistes s'étaient ralliés à lui). Chevènement a laissé filer une occasion plus glorieuse d'entrer dans l'histoire. Peut-être était-il encore sous le coup de sa responsabilité dans l'échec de la gauche en 2002. Il n'a jamais été aussi bon analyste politique qu'il le croyait.

Le facteur écolo

Seuls les écologistes constituent une force alternative suffisamment fondée politiquement. Concrètement, ils sont les seuls à pouvoir présenter certaines exigences cohérentes sur leurs thèmes s'ils arrivent à se mettre d'accord entre eux. Mais cela signifie aussi qu'ils auraient mieux fait de négocier une alliance comme les Radicaux et le MRC pour tenter le jackpot en créant la dynamique pour une élection de Ségolène Royal au premier tour.

Il faudrait pour cela que le droit à la différence, l'intransigeance irréaliste et les actes symboliques ne soient pas leurs modes d'action favoris. Alors que la politique et tout spécialement les élections, relèvent à l'évidence de la capacité à l'unité et à réaliser des coalitions (voir Coalitions et clientélisme). La 5e République l'a un peu fait perdre de vue. Les écologistes attendent-ils un homme providentiel ? Pourquoi pas une femme ?

L'autre facteur

Le facteur décisif aurait pu être une déclaration solennelle de Jospin avant le premier tour, dans le sens du vote utile, fort de son expérience malheureuse, qui solderait honnêtement son bilan en lui rendant sa dignité. En cas de succès, cela aurait eu au moins l'avantage de laver le déshonneur et le ridicule général de l'élection présidentielle de 2002. Il aurait fallu quand même tenter le coup.

Jacques Bolo


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