Question qui fâche
La question de l'unicité du génocide commis par les nazis à l'encontre des juifs est une
question qui provoque une tension permanente depuis une vingtaine d'années. Elle repose
davantage sur un malentendu, ou une querelle sémantique, que sur une réalité. En effet, il ne
me semble pas que le génocide soit contesté par beaucoup de monde, contrairement aux
inquiétudes de la communauté juive, qui seraient légitimes si c'était le cas. Mais évidemment,
il est difficile de faire un sondage sur le sujet, soit que les personnes interrogées puissent
dissimuler leur opinion, soit que les questions elles-mêmes puissent être considérées comme
douteuses. Toute cette problématique est d'autant plus absurde que les rares personnes qui
contestent l'extermination des juifs, les négationnistes, sont précisément celles qui y seraient
favorables ! Comme pour la mafia, ceux qui contestent son existence en font généralement
partie. Il s'agit d'un mode de discours fondé sur la dénégation, ou exprimé sous forme
d'insidieux sous-entendus.
Plusieurs situations peuvent coexister. L'antisémitisme et le négationnisme vrais concernent seulement
les néo-nazis déclarés ou dissimulés sous des dehors respectables. Mais le soupçon semble contaminer
tout le monde et provoque, comme c'est l'usage dans ces situations, des réactions interprétées à
leur tour comme de l'antisémitisme. Personne n'aime être en position d'accusé, et dans ce cas, les
réactions semblent souvent confirmer les soupçons. C'est un mécanisme classique de
prédiction créatrice. Par ailleurs, des phénomènes quasi-pathologiques apparaissent
également, comme des fausses agressions antisémites, voire un cas assez extraordinaire de
faux déporté en Espagne. Il existe aussi, chez certains intellectuels, une théorie qui tendait à
discréditer les témoignages humains, au nom de la critique littéraire radicale [1].
Mais surtout, l'accusation d'antisémitisme est utilisée pour décrire l'antisionisme
extrémiste de l'extrême gauche ou des terroristes. Notons au passage que ces
derniers peuvent précisément être manipulés par d'authentiques antisémites, qui ne demandent
pas mieux que de jeter de l'huile sur le feu.
Or, mettre tout le monde dans le même sac de l'antisémitisme est une très mauvaise stratégie,
puisqu'on risque surtout de finir par faire l'unanimité contre soi. En France, cette idéologie
pessimiste sur la nature humaine a déjà caractérisé la seconde étape du traitement de la
question, dans les années 1970, où après le mythe d'une France résistante de l'après-guerre
cher aux gaullistes, un certain gauchisme soutenait que tous les Français étaient pétainistes,
voire collaborateurs ou délateurs. On en est heureusement revenu, et depuis les années 1990,
le rôle de ceux qui ont aidé les juifs, au péril de leur vie, a été reconnu, et récompensé parfois
du titre de justes par Israël. Il semblerait donc que ce renouveau du pessimisme reproduise le
maximalisme gauchiste sous l'influence de la conjoncture internationale où la France joue un
peu le rôle du bouc émissaire. Ce maximalisme peut se caractériser par une sorte de principe
anti-Loth qui consiste, contrairement à la fameuse histoire biblique de Loth à Sodome, à
condamner toute la ville si on y trouve une minorité de coupables, au lieu de marchander avec
Dieu comme il le fît, pour essayer de l'épargner si on y trouve quelques justes [2].
Comme on le sait, cette question de l'unicité provoque donc un certain agacement, dans la
mesure où certaines souffrances se considèrent minimisées (aujourd'hui, surtout les noirs et
les palestiniens, mais aussi les tziganes, homosexuels, russes, polonais, etc. dans le cas du
nazisme ; voire les japonais d'Hiroshima et Nagasaki et pourquoi pas les soldats allemands
après leur défaite récemment [3]). Cette perception n'est pas toujours infondée dans la mesure
où certains membres de la communauté juive peuvent aussi s'exprimer maladroitement. Mais
pas plus que pour les non-juifs, il n'y a aucune raison que les juifs méprisent la souffrance des
autres communautés, à l'exception de quelques imbéciles, comme dans tous les groupes
humains. Et précisément, cette compassion réciproque exclut la possibilité de minimisation de
la Shoah, ou sa négation, d'autant que cette compassion a bien eu l'occasion de se manifester
au moment où c'était nécessaire et quand ce n'était pas si facile. Si toute la question peut se
réduire finalement à présenter aussi les autres drames à la télévision pour qu'ils ne se sentent
pas oubliés, cela ne devrait pas constituer un problème. Les médias sont effectivement
aujourd'hui le lieu de la légitimation et chacun devrait pouvoir y avoir accès. C'est plutôt une
question de contraintes spécifiques : avoir des images, un bon dossier, créer l'événement...
Une des raisons de la situation de malaise réside aussi dans la terminologie employée. Les
termes unicité ou singularité, semblent effectivement minimiser les autres souffrances.
D'autant que certains intellectuels se livrent à des gloses infinies et généralement
contradictoires en concluant à la nature incomparable du génocide en question (alors que bien
évidemment il faut pour cela effectuer une comparaison [4]). Une explication pourrait consister dans un malentendu qui serait apparu du fait de l'absence de familiarité du grand public, ou des
littéraires, avec la méthodologie historique. Car en histoire, tout événement est singulier par
définition [5]. Il en résulte que le génocide des juifs par les nazis est unique, le génocide des Arméniens par les Turcs est unique, l'esclavage des Noirs par les Européens ou les Arabes est
unique, le martyre des Chrétiens par les Romains est unique, le massacre des Cathares par les croisés de
Simon de Monfort est unique, les crimes de la colonisation sont uniques, etc. La
problématique se réduit tout simplement à l'identification d'un fait historique indéniable (sous
peine de négationnisme).
Réductionnisme marxiste extrémiste
Inversement, c'est dans le cadre de la question de l'irréductibilité que la position marxiste s'est
manifestée, dans le fameux texte d'Amedeo Bordiga, Auschwitz ou le grand alibi, (1960). Ce
texte est assez souvent présenté comme une des bases du négationnisme de gauche,
essentiellement parce qu'il opère précisément une réduction du génocide et de nazisme à une
sorte de stade ultime du capitalisme. Il faut se souvenir cependant de la domination
intellectuelle du marxisme depuis les années staliniennes, contemporaines de la montée de
nazisme, jusqu'à la fin des années 1970. Et conformément à l'orthodoxie marxiste, ce petit texte
réduit bien le génocide des juifs (et des autres) à une conséquence économique
du capitalisme. L'interprétation y est radicale jusqu'à la caricature :
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« La guerre est la solution capitaliste de la crise ; la destruction massive d'installations, de
moyens de production et de produits permet à la production de redémarrer, et la destruction
massive d'hommes remédie à la 'surpopulation' périodique qui va de pair avec la
surproduction. »
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On reconnaîtra dans cette radicalité la capacité des modèles intellectuels à construire un
raisonnement pour tester une hypothèse. De ce point de vue, les marxistes sont avant tout des
bons élèves. Et dans la tradition philosophique, allemande surtout, ils ne s'embarrassent pas
de contrôle par la réalité. On peut analyser généreusement ce discours comme la production
d'un raisonnement par l'absurde, ce qui est toujours légitime, voire de bonne méthode, mais
il se discrédite en ne considérant pas l'absurdité comme une réfutation. Le matérialisme
pourrait constituer ce contrôle par la réalité. Mais il s'agirait sans doute ici de ce que le
marxisme appelle le matérialisme vulgaire, alors que le dogme du matérialisme historique (qui
condamne la bourgeoisie au profit du prolétariat) sert ici de seul critère de vérification. Sachant
que, selon la doctrine appliquée dans le texte de Bordiga, « il n'y a pas de passion sociale
[l'antisémitisme] libre », non déterminée
économiquement, et que « les juifs se trouvent aujourd'hui essentiellement dans la moyenne
et petite bourgeoisie. Or cette classe est condamnée par l'avance irrésistible de la
concentration du capital. » Donc les petits bourgeois s'éliminent entre eux parce qu'ils n'ont pas
de conscience de classe, à l'inverse des prolétaires chez qui « les poussées [de racisme] n'ont
lieu qu'aux pires moments de démoralisation, et ne durent pas. » On suppose qu'il s'agit ici des
pogroms.
A la décharge de ce modèle, en ces temps de concentration capitaliste et de concurrence
internationale, il serait tentant de considérer la solution marxiste comme une interprétation
possible, où : « Le racisme n'est pas une aberration de l'esprit : il est et sera la réaction
petite-bourgeoise à la pression du grand capital. » Il suffirait de considérer que la notion de
petite bourgeoisie s'est élargie, ou plus généralement qu'en cas de crise, les petits bourgeois
en concurrence trouvent des têtes de Turc, pourvu qu'un homme politique leur désigne un
ennemi commun : une minorité ou une cible étrangère. On reconnaîtra ici sans peine les outils
toujours disponibles pour les hommes politiques passés ou contemporains [6]. L'indulgence
envers les prolétaires pourrait également être considérée comme du clientélisme. Car leur
différence avec les petits bourgeois inconscients semble reposer exclusivement sur l'hypothèse
que le prolétaire reconnaisse l'ennemi de classe que l'avant-garde marxiste a bien voulu lui
indiquer [7].
Cette négation/minimisation de la conscience du petit bourgeois ou du prolétaire est également
un artifice intellectuel qui confond les grandes synthèses (féodalité, capitalisme, socialisme)
avec les micro-décisions qui résultent des représentations des acteurs en situation. C'est une
tradition de la philosophie classique depuis Platon de prétendre nous dire ce qui se cache
derrière les apparences. Pour le marxisme, c'est toujours l'économie (parfois appelée social).
En fait, ce modèle n'explique pas pourquoi, au cours de la précédente guerre mondiale, les
juifs et leurs camarades nationaux (dont Hitler) s'étaient trouvés unis pour combattre les autres
juifs et nationalistes de l'autre camp. Nous savons justement que ce point a été un des
éléments qui a donné aux anciens combattants juifs une fausse impression de sécurité. Ce
modèle n'explique pas vraiment pourquoi un pays élimine certains de ses propres citoyens, tout
au plus prétend-il expliquer comment, toujours par cette idée de surexploitation capitaliste :
« [Hitler] ne les a d'ailleurs pas tués tout de suite. [...] Et il les a fait travailler en les
sous-alimentant, c'est-à-dire en les surexploitant à mort. Tuer l'homme au travail est une vieille
méthode du capital. » En outre, le négationnisme peut consister en cela que Bordiga n'adopte
pas l'approche intentionnaliste qui veut que le génocide ait été réellement planifié, et le
considère comme résultant d'une exacerbation due à la guerre.
La spécificité du nazisme
Au contraire, la spécificité du nazisme est bien le racisme et l'antisémitisme visant
l'élimination des minorités en question. On peut considérer que le nazisme correspond
à une sorte de guerre de religion totale, combinée aux idées du début du XXe siècle
sur les races et la génétique. Sans cette spécificité, le nazisme aurait été un simple régime fasciste
comme ceux des autres pays d'Europe de l'époque : Italie (1922), Espagne (1923 et 1939),
Autriche (1933), Hongrie (1920), Roumanie (1935), France (pétainiste 1940), sans parler bien
sûr de l'URSS (1917), etc., autant de pays où l'antisémitisme populaire plus ou moins latent n'aurait
sans doute pas été érigé en politique (notons l'exception des USA pour la ségrégation). Ces
idées latentes résultent d'anciens modes d'organisations tribaux ou communautaristes, sur le
principe germanique Cujus regio, ejus religio (l'adoption obligatoire de la religion du prince). Le
cas pétainiste montre bien que certains voulaient revenir à un état antérieur de la société
française, pré-révolutionnaire, avec un statut des juifs et autres indigènes. De ce point de vue,
le fascisme ne peut pas être considéré comme identique à la démocratie [8],
contrairement à cette tendance marxiste orthodoxe que révèle encore plus caricaturalement un autre
texte du même Bordiga :
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« Démocratie signifie collaboration de classe, neutralisation de toute lutte de classe,
conservation maxima de la forme sociale existante. Aucun fascisme, aucune dictature de la
classe capitaliste ne peuvent être plus conservateurs que la démocratie, acceptée par le Capital
aussi longtemps que le prolétariat a la bêtise de l'accepter. Historiquement le fascisme
représente une situation plus révolutionnaire que la démocratie. Ceci a été pleinement théorisé
par Engels à la fin de sa vie, et non pas comme le firent stupidement les staliniens européens
de 1922 – cette honte est en premier lieu italienne – voyant dans le fascisme un retour du
régime bourgeois au despotisme féodal. Pour Engels, le fascisme donne à la classe dominante
la responsabilité et l'initiative de rompre la trêve libérale et de déclencher la guerre de classe
moderne ». (A propos de deux sommets scatologiques [9], 1959).
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Cette incapacité à percevoir la spécificité fasciste, qui correspond assez bien à un retour au
despotisme féodal (retour légitimiste et religieux), et l'incapacité à percevoir la spécificité nazie
(le racisme et l'antisémitisme) s'accompagnent d'ailleurs d'une erreur d'analyse puisque la trêve libérale
constitue précisément l'apport évolutif de la démocratie. L'eschatologie socialiste du marxisme orthodoxe, qui
doit beaucoup à la notion hégélienne de dépassement, supprime assez magiquement les "contradictions", les antagonismes sociaux (Marx avait noté que la conception proudhonienne les conserve, ce qui suscitait
sa raillerie). Dans la société bourgeoise libérale, le fait de constater que les conflits sont toujours latents doit précisément enregistrer leur traitement (juridique, politique) sur un mode codifié. Vouloir rendre
les conflits patents dans la guerre sociale est tout simplement une régression qui déclenche précisément une escalade dans la réaction fasciste qui organise ces antagonismes côté bourgeois et petit-bourgeois, comme le marxisme les organise côté prolétaires.
Démocratie et minorités
La polémique sur l'unicité provient sans doute aussi de la polarisation sur le mode
d'extermination, qui semble dire que des morts au cours du transport, au travail, ou de maladies
dues aux conditions de vie n'auraient pas la même valeur que des exécutions par balle ou dans
des chambres à gaz. Or le crime est précisément déjà dans la déportation, qui n'est pas un simple
déplacement de population (comme quand on noie une vallée pour construire un barrage), ni
même un regroupement provisoire dans un camp (comme les Japonais en Amérique pendant
la deuxième guerre mondiale), ce qu'il prétendait être. Outre l'illégitimité de
parquer les gens, si autant de personnes meurent en route ou sur place du fait de mauvais
traitements, le régime change de nature. (Mais on peut concéder aux marxistes que cela concerne aussi les cas du capitalisme ou des autres régimes quand « tuer les gens au travail » ou l'esclavage sont en cause).
Une cause de cette illégitimité fondamentale à disposer des individus est observable dans le fait qu'en son
absence, seul le droit de propriété semble garantir une réparation aux victimes (comme pour
la question de la restitution des oeuvres d'art volées par les nazis). Il est urgent de prévoir sanctions et réparations pour les manquements à l'habeas corpus qui garantit les droits de l'individu en tant que tel.
Cette négation nazie de l'individu est bien le stade ultime du fascisme et non du capitalisme.
Contrairement au capitalisme qui exalte l'individu, le fascisme institutionnalise le holisme
communautaire de la société traditionnelle. Le fait que le marxisme partage cette caractéristique,
notamment avec la propriété collective, le rend forcément aveugle à cette réalité, à l'inverse du
libéralisme bourgeois [10] qui affirme les droits formels du citoyen.
Mais le culte de la majorité, dans la tradition rousseauiste, peut aussi faire
oublier qu'un état n'a pas le droit de disposer de ses populations minoritaires.
Pour conclure, soulignons que ce qui est interprété par la communauté juive comme une
complaisance à l'égard du négationnisme, me semble donc plutôt résider dans une inquiétude
devant la situation internationale. Dans des situations de ce genre, les acteurs ne veulent
presque jamais accorder de concessions à l'adversaire, y compris sur les points sur lesquels
ils sont d'accord, mais qu'ils réinterprètent selon leur cadre théorique partisan. Inversement,
certains qui donnent raison à l'un des camps peuvent le faire aussi pour des motifs intéressés
ou manipulateurs. La majorité de ceux qui manifestent une certaine résistance à l'unicité du
génocide des juifs par les nazis veulent en fait souligner l'universalité de cette spécificité
raciste [11] (qui s'oppose donc à la réduction économique
marxiste, assez passée de mode).
C'est tout le problème de la généralisation. Contre l'égarement de l'histoire dans la singularité et celui
de la philosophie dans l'abstraction, ce devrait être le rôle des sciences sociales d'extraire les
concepts de l'expérience historique pour les rendre effectivement universels.
Jacques Bolo
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Notes
1. On a pu ainsi assister au dialogue suivant à propos d'une biographie quelconque :
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« – Il n'y a pas, si vous voulez, d'invention, tout est vrai, tout ce qui est dans le texte est dit, repéré, répertorié, fiché. Il n'y a absolument...
« – Mais vous savez que c'est tout de même une fiction. Toute biographie est tout de même une fiction (...) Vous n'allez pas dire qu'une biographie est quelque chose qui dit des choses vraies. » (France Culture, Panorama, nov. 1990).
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Cette théorie intellectualiste de la fausseté des biographies a pu aussi être utilisée, dans la même période, à propos du Journal d'Anne Frank. [Retour]
2. Notons que le fait de préférer un innocent en prison à un coupable en liberté caractérise l'état de police, alors que préférer un coupable en liberté à un innocent en prison caractérise l'état de droit. [Retour]
3. On oublie généralement les Ethiopiens, Manchous, Chinois et autres qui ont précédé la deuxième guerre mondiale, auxquels on peut ajouter les victimes du racisme et de colonialisme. [Retour]
4. La méthode comparative est d'ailleurs absolument nécessaire dans les sciences humaines (du fait de la quasi absence de possibilité expérimentale). De plus, personne ne peut évidemment s'arroger le droit
d'interdire à quiconque de comparer ou de penser ce qu'il veut. [Retour]
5. C'est cette idée de singularité qui différencie traditionnellement l'histoire de la philosophie qui, elle, essaie de trouver des concepts plus généraux (souvent trop). De ce point de vue, on peut considérer que la sociologie réalise une synthèse des deux disciplines en dépassant le problème. L'histoire (signifiant étymologiquement enquête) et la philosophie (conceptualisation) sont alors des méthodes de la sociologie. Mais cette question de l'unicité ressurgit également dans l'anthropologie culturelle (ou ethnologie), dont les études de terrain aboutissent
souvent en dernière analyse une tendance à l'intraduisibilité culturelle (en particulier à travers le modèle
Sapir-Whorf). [Retour]
6. Mais une réaction aussi extrême suppose sans doute de se sentir davantage acculé, car la crise est aujourd'hui plus que relative. Au contraire, l'embourgeoisement actuel contredit l'idée marxiste de
paupérisation. La concentration contemporaine se fonde d'ailleurs, directement ou indirectement, sur une
participation des travailleurs eux-mêmes par les fonds de pension ou les systèmes de retraite. [Retour]
7. Or comme cette avant-garde constitue l'élite (soit disant ouvrière) qui remplacera ceux qui dirigent les concentrations capitalistes dans de nouvelles concentrations socialistes, les mauvaises langues
pourraient penser que ces beaux discours sont seulement un moyen de prendre le pouvoir. Et s'il était question de pouvoir aux conseils ouvriers (soviets), il n'y a donc pas de différence formelle avec un capitalisme populaire. [Retour]
8. Qui se manifeste par exemple par le principe (démocratique formel) : une personne, une voix aux élections. Ce point (entre autres) permet par exemple de nier l'accusation de racisme ou d'apartheid en Israël, du fait du droit de vote accordé aux arabes israéliens, comme le rappelle l'ambassadeur d'Israël en France, Elie Barnavi. [Retour]
9. Les sommets en question, entre Eisenhower et Khrouchtchev, sont bien qualifiés de
scatologiques et non d'eschatologiques, par Bordiga. [Retour]
10. Ou du socialisme démocratique, mais ce dernier sacrifie toujours au vocabulaire collectiviste du marxisme. [Retour]
11. D'ailleurs, on ne voit pas très bien à quoi correspondrait l'intérêt pour cette question si elle ne concernait
que la communauté juive. Le fait qu'on lui accorde une sorte de monopole, outre des motivations
intéressées, peut résider dans le fait de se rabattre sur le symbolique par insatisfaction devant le
traitement rationnel habituel. [Retour]
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