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Culture - Août 2023

Killing Eve (série américano-britannique, 2018)

Résumé

Traque de la tueuse tarantinesque. Très décevant, contrairement à sa bonne réputation.

Réalisation : Damon Thomas et al., Scénario : Phoebe Waller-Bridge, EmeraldFennell, Suzanne Heartcote, Laura Neal (d'après Luke Jennings), Production : Sid Gentle Films, Musique : David Holmes, Avec : Sandra Oh, Jodie Comer, Fiona Shaw, Kim Bodnia, Owen McDonnell, Sean Delaney, Darren Boyd, David Haig, Kirby Howell-Baptiste, Nina Sosanya, Edward Bluemel, Henry Lloyd-Hughes, Adrian Scarborough, Raj Bajaj, Turlough Convery, Steve Pemberton, Danny Sapani, Harriet Walter, Gemma Whelan, Camille Cottin.

J'avais vu la première saison à sa sortie en ratant les trois suivantes, ce qui m'avait laissé sur ma faim. Après coup, je me dis que je n'avais pas perdu grand-chose.

Eve Polastri est une analyste d'un service de contre-espionnage anglais qui veut approfondir, contre l'avis de sa hiérarchie, une enquête sur des liens entre des morts suspectes un peu partout en Europe. On apprend vite qu'il s'agit d'une tueuse professionnelle mystérieuse et habile, Villanelle, inspirée fortement de Nikita (1990) de Luc Besson.

La première saison correspond assez au principe des séries policières ou d'espionnage anglaises que j'aime assez, d'où mon engouement initial. La suite tourne plutôt aux séries kitsch des années 1960, ce qu'accentue la musique. Je pense à Chapeau melon et bottes de cuir (1961-1969). On se dit que le gore kitsch de Tarantino a fait école. C'est une facilité qui abuse du « Licence to kill » james-bondesque. Bon, c'est normal pour une tueuse, mais cette histoire de société secrète régresse aux parodies lourdingues de la pub pour les assurances Maif. Je suppose que les fans de Tarantino apprécient. Son genre de caricature est au cinéma ce que Trump est à la politique... avec les partisans obtus qui vont de pair.

Bref, les aventures de l'analyste Eve partent d'un professionnalisme magistral entraîné inexorablement sur la pente kitsch. On pourrait penser qu'elle entre magiquement dans un autre film (on pense à Rose pourpre du Caire de Woody Allen), tout en essayant d'y résister constamment. Tout ça finit par se limiter aux états d'âme vaguement érotisés des deux principales protagonistes. Il faut dire que les seconds rôles les plus intéressants sont progressivement assassinés. Il ne reste plus grand monde à la fin. Mais on se maintient néanmoins dans une pudibonderie d'un autre âge, toujours les années 1960, sur le fameux mode d'alors du : « No sex, please. We are British ! » Au passage, remarquons que la série est déconseillée aux moins de dix ans. Les assassinats sont-ils moins traumatisants que le sexe ?

Le côté désabusé lorgne vers l'ambiance de L'espion qui venait du froid (1965), mais n'a pas le niveau. À la rigueur, cette trop grande personnalisation, où chaque agent joue son propre jeu, correspond peut-être bien à la réalité des services secrets dont les agents peuvent, de par leur clandestinité, se livrer à des manipulations à leur seul profit, quand ce n'est pas uniquement en réplique aux vaines manipulations équivalentes de leurs homologues et concurrents. C'est la limite du système et en grande partie celle de la condition humaine. J'ai bien vu moi-même la série jusqu'au bout, par excès d'optimisme.

Jacques Bolo

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