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Sociologie / Culture (cinéma) - Juillet 2020

Louis de Funès et le populisme

Résumé

Le cinéma est souvent un miroir sociologique du pays.

La Cinémathèque française célèbre l'acteur Louis de Funès (1914-1983) du 15 juillet 2020 au 31 mai 2021 (après un report dû au confinement pour coronavirus). Outre le fait que, pour les intellectuels, tout devient culturellement légitime après un certain temps, on peut quand même soupçonner une tentative de renflouer les caisses de la Cinémathèque en attirant un peu plus de monde que d'habitude et qu'aux séances de cinéma d'avant-garde qui continuent parallèlement. Est-ce que le public de Louis de Funès viendra à la Cinémathèque et les habitués bouderont-ils le pitre ? La présentation le légitime comme amateur et pianiste de jazz. Ce n'est franchement pas nécessaire. Certains de ses films se suffisent à eux-mêmes, pour le reste, il existe toujours des amateurs de nanars, paradoxalement surtout chez certains intellectuels qui les considèrent comme « culte ». Ce n'est pas mon cas : mes films cultes sont des bons films, pas des mauvais. La réalité de l'audience cinématographique est plutôt simplement qu'on va souvent voir un peu de tout, mais certains n'avouent pas fréquenter les films populaires par snobisme. Ils passent finalement à la télévision. Et quand ça marche, ils repassent et repassent. C'est le cas des films de Louis de Funès.

La plupart des films où Louis de Funès joue un rôle important ou un premier rôle sont effectivement de bons films et certains sont excellents, à part la série de Fantômas et des gendarmes qui sont très lourdingues. Je suppose que c'est de ceux-là dont on parle quand il est question de « cinéma populaire ». C'est ce populisme qui est méprisant et franchement démago. Les autres films sont simplement du cinéma plutôt classique avec de belles originalités de dialogue, de jeu ou de scénographie qui font qu'un film laisse un bon souvenir.

Ce qui caractérise Louis de Funès est le personnage excité et égoïste qui a tendance à être un peu répétitif. On peut nuancer en disant qu'à l'époque, on prenait souvent la peine de faire de nouveaux films avec de nouvelles histoires au lieu de faire simplement des suites (ce qui a justement commencé pour lui avec la série des gendarmes ou Fantômas). Concrètement, les bons films de Louis de Funès relevaient d'un style s'approchant d'une actualisation cinématographique du théâtre de boulevard (la version scénique a tendance à radoter), souvent sur des thèmes d'actualité.

Le problème avec Louis de Funès, c'est que le personnage de connards qu'il incarne pour les ridiculiser (le gentil est souvent joué par Bourvil) est devenu le modèle de certains qui voient dans ses films une approbation : c'est devenu l'idéal franchouillard. Cet idéal se croit populaire parce qu'il est populiste et que les cons qu'il joue passent à la télé ! Quand je suis arrivé à Paris en 1981 en tant que cinéphile et pour profiter du nombre important de salles, comme beaucoup de films ont Paris pour décors j'avais l'impression d'être dans le film. Depuis les années 1990-2000, en France, on a plutôt l'impression d'être dans un film avec plein de Louis de Funès partout, dans les médias surtout. L'humour en moins et les dialogues sont médiocres. Au fond, les gens jouent simplement les rôles qu'ils connaissent (par coeur), que leur fournissent les professionnels qui croient à tort que les spectateurs comprennent le sens de l'histoire. C'est le drame de ce bovarysme généralisé.

Jacques Bolo

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