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Culture / Politique - Avril 2015

Eduardo Manet : Mes années Cuba (2004)

Résumé

Eduardo Manet nous promène sous le soleil du Cuba de son enfance et de sa jeunesse avec l'ombre de Castro qui le poursuit.

Eduardo Manet : Mes années Cuba, coll. « Le livre de poche », ed. Grasset et Fasquelle, Paris, 2004, ISBN 9782253117872.

Eduardo Manet nous raconte « ses années Cuba », depuis son enfance dans les années trente jusqu'à son second départ définitif de Cuba pour la France, en 1968, après un premier séjour en Europe et un retour à La Havane au début de la révolution castriste.

Manet a grandi à Santiago, éloigné de son père, avocat à La Havane, qui avait été ministre de l'Éducation du gouvernement Zayas, avant Batista. L'enfance de Manet fut marquée par les chimères historiques et politiques de l'imagination de sa mère et des milieux intellectuels réfugiés à Cuba dans cette époque troublée, depuis cet observatoire périphérique qui, quelque temps plus tard, allait devenir momentanément central dans l'histoire mondiale.

Curieusement, le livre alterne entre les souvenirs personnels de sa vie d'enfant et une biographie de Fidel Castro. Ce livre pourrait incarner une sorte de théorie de la littérature sur le mélange de la réalité et de la fiction, dont l'enfant qu'il était nous donne la clé dès le début : « Ma mère avait le don d'interpréter la réalité à sa convenance, tout comme elle ne se privait pas de réinventer sa vie au jour le jour. » Une histoire officielle et officieuse.

Ses études universitaires, dans la période troublée de la domination américaine à Cuba, marqueront son éducation politique de jeune intellectuel. De plus en plus de jeunes devaient vivre cette même expérience au cours de la formation de la période démocratique de ces deux derniers siècles. Au point qu'on se demande même parfois si Manet ne mélange pas les lieux et les époques.

Manet saisira l'occasion pour partir pour la France, en 1951, où il ratera de peu la chance de revoir Louis Jouvet, qui venait de mourir un mois auparavant. Il l'avait rencontré au cours d'un repas chez son père et devra se contenter de Jean-Louis Barrault et Madeleine Renault, excusez du peu, avant de suivre une formation de mime avec Jacques Lecoq, puis une aventure théâtrale en Europe. Toujours ce recul de l'enfant qui jouit goulûment de cette aventure en gardant un oeil sur les péripéties cubaines et les épisodes de la vie de Castro.

À l'occasion d'un retour à Cuba pour une prestation artistique, peu après la révolution, on lui proposera une direction théâtrale qui lui donnera l'occasion de vivre les débuts de l'installation du pouvoir castriste. Surtout après l'embargo américain, Eduardo Manet en constatera les dérives bureaucratiques et staliniennes dans la pratique artistique et la vie quotidienne. Il énoncera très bien le mécanisme quasi littéraire de l'idéologie : « Le pouvoir des mots à la place des idées. L'image se substituant à la pensée ». Manet gardera cette forme de regard décalé qui lui donne peut-être un peu le beau rôle : « schizophrénie pratique ».

La saturation lui fera quitter l'île pour la France, et la vie d'artiste. Une belle histoire du côté de soi.

Jacques Bolo

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