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Internet / Politique - Août 2013

Hackers, Anonymous, NSA

Résumé

La théorie du complot serait-elle validée par l'affaire des révélations de Snowden sur la NSA ? Ou le buzz n'est-il que médiatique ?

Depuis les débuts de l'informatique, le mythe du hacker repose sur une ambiguïté. C'est aussi ce qui entretient la légende de Steve Jobs d'Apple ou Bill Gates de Microsoft. Même s'il existe toujours une part de vérité, il ne faut pas confondre utilisateurs et programmeurs, ni croire que les entrepreneurs sont forcément des génies de la programmation. Le mythe est né quand peu de personnes possédaient un ordinateur. Mais il subsiste tout simplement parce que même si presque tout le monde possède un appareil informatique (ordinateur, tablette, console de jeu, smartphone...) ou sait en utiliser, les spécialistes sont toujours peu nombreux (et ne sont pas compétents dans tous les domaines). Une raison est d'ailleurs que les progrès de la convivialité (Web 2.0) permettent à de simples utilisateurs de créer et animer un site ou un blog sans les connaissances en informatique qui étaient nécessaires dans les années 2000. Mais ce n'est pas de la programmation qui permettrait de pirater les fichiers de la CIA ou de son voisin.

Le mythe est entretenu par la presse. Pour l'informatique, après avoir titré sur les nazis et les pédophiles, les médias ont trouvé récemment le créneau du Big Brother de la NSA pour vendre leur salade, entre deux faits divers et la rubrique people. Il faut dire que le cinéma avait balisé assez bien le terrain depuis la Guerre froide jusqu'aux justiciers qui déjouent les complots des puissants ou des super-méchants (un peu démodés depuis James Bond, mais de retour avec les super-héros de bandes dessinées), ou les X files. Ce qu'on appelle les théories du complot se réduisant essentiellement à des scandales de corruption, présents de toute éternité, anciennement représentés dans les films policiers (style Le grand sommeil).

Le piratage et l'espionnage informatiques sont une réalité. Mais il est absurde de parler d'atteinte informatique aux libertés publiques, spécialement de la part de la NSA. Même si toutes les communications sont interceptées (il ne fait à peu près aucun doute qu'elles peuvent l'être), outre la nécessité d'une forte capacité de traitement (qui va sans doute augmenter), il est certain que la vie privée n'est pas compromise. Ceux qui prétendent le contraire le font pour se faire mousser.

D'abord, il est bien évident qu'un service secret peut décider d'intercepter les communications ou surveiller n'importe qui, s'il y met les moyens. C'était vrai avant Internet. C'est simplement plus facile, puisque tout le monde s'équipe de moyens électroniques facilement écoutables. Mais la majorité de nos communications sont publiques, en particulier sur les réseaux sociaux. On ne peut pas non plus reprocher à la NSA d'utiliser Google quand elle s'intéresse à quelqu'un. Les terroristes qui communiquent par Internet prennent des précautions. Comme ils abandonnent parfois ce moyen pour les moyens traditionnels, on pourrait accuser la poste traditionnelle d'être leur complice.

Pour les informations ou la correspondance personnelle, outre qu'il était bien possible de surveiller le courrier ou le téléphone auparavant, il faut simplement se dire que tout ce qu'on met dans un ordinateur connecté n'est pas inviolable. Il ne s'agit pas de dire qu'on n'a rien à cacher, parce que c'est effectivement gênant d'être observé. Mais le fait est que les services secrets n'ont rien à faire des histoires personnelles.

Entendons-nous bien. Il est bien évident qu'un agent indélicat pourrait utiliser des données intimes dans son propre intérêt. La question posée est ici la privatisation de la surveillance. Mais on sait bien, pour l'avoir souvent vu dans les films policiers, que les agents rendent de petits services à leurs amis journalistes, aux politiciens, quand ils ne sont pas eux-mêmes corrompus. Le piratage informatique généralise la possibilité, mais c'était déjà présent pour les indélicatesses de tous les professionnels (médecins, juristes, administrations, réparateurs).

C'est angoissant de se dire qu'on peut tout savoir sur nous. Mais, Internet n'a pas inventé les ragots. Comme je le disais dans mon article précédent, le véritable problème concerne plutôt le jugement que l'on porte. En 2012, les emails du général Petraeus ont révélé sa correspondance avec sa maîtresse. Ce n'était pas très prudent de sa part, et il ne faut donc pas espérer être plus à l'abri que cet ancien directeur de la CIA. Le problème est plutôt que les Américains se servent donc de la vie privée pour juger les personnes sur le plan professionnel. On pourrait le faire chanter ? Seulement parce que c'est important pour la société américaine. Si Petraeus assumait son infidélité, on n'aurait aucun moyen de pression sur lui. Nous avons eu l'exemple de DSK et il est déplorable qu'on s'aligne sur les États-Unis sur ce point. C'est bien la liberté qui est la meilleure protection des libertés.

Jacques Bolo

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